En juin 2016, j’ai eu l’opportunité d’assister à 2 ateliers successifs sur les écoquartiers, l’un organisé par la DDT 49 sur ‘le rôle du concepteur’ et l’autre par la DREAL des Pays de Loire ‘Quels coûts pour les écoquartiers ?’.
L’objectif de ma venue : comprendre la démarche de ce label d’état et identifier les pistes d’action en lien avec ma pratique professionnelle d’ingénieure paysagiste conseil en cadre de vie.
A l’issue de ces rencontres et ses témoignages j’ai été confortée quant à ma démarche consistant à penser le paysage urbain et la vocation des espaces publics en amont et collectivement avec les élus, les agents d’entretien et surtout les habitants.
Cet article propose une synthèse sur les temps forts de ces 2 ateliers.
Qu’est-ce qu’un écoquartier ?
Créé par le Ministère du logement et de l’égalité des chances, le label Ecoquartier s’appuie sur un référentiel accessible à tous permettant une réflexion globale en amont de la réalisation de projets d’aménagements durables quelles que soient leur taille et leur particularité territoriale.
L’engagement dans la labellisation permet aux collectivités d’améliorer l’image et la lisibilité de leur projet en termes de développement durable.
La grille permet de vérifier la faisabilité d’un projet et de conduire une démarche s’appuyant sur 4 axes de travail :
L’exemple du quartier de la Barberie à Changé (53)
La cartographie des usages préexistants par des mesures en immersion aux moments forts d’activité (soir, mercredi, week-end, …) permet d’identifier les habitudes de vie.
L’analyse des pratiques sur Changé a conduit à renforcer les continuités de liaisons douces avec les autres quartiers ou une ferme située à proximité, à valoriser les espaces existants, comme une prairie en jardin et en parc.
De même, l’aménagement des espaces publics peut se construire avec les nouveaux habitants et permettre de proposer des réalisations adaptées aux usagers tels que les enfants, comme par exemple la fontaine construite à partir de dessins d’enfants.
Construire un projet d’aménagement en amont implique une réflexion sur les espaces publics, leur coût et leur entretien futur par les services techniques.
Ainsi un quartier d’habitation en milieu rural comme celui de Changé dispose de voiries plus étroites et sans bordures, limitant ainsi les coûts d’investissement, réduisant le taux d’imperméabilisation et par effet ricochet la vitesse des véhicules. L’absence de bordures limite aussi le développement d’herbes folles et les interventions d’entretien.
L’anticipation de l’entretien des espaces verts en gestion différenciée participe à une réduction des charges, en acceptant toutefois de former le personnel à cette nouvelle démarche.
En campagne, l’usage de la voiture prédomine avec un effet négatif sur le paysage urbain. Chaque foyer dispose de 2 voire 3 véhicules, qui se garent souvent sur les trottoirs et devant les habitations.
L’aménagement de parkings semi-enterrés, groupés sous abris ou mutualisés à l’entrée du quartier avec le parking du cimetière, réduit l’impact visuel sur le paysage. Ce type de stationnement offre en outre une belle opportunité de rencontre entre les habitants.
Le positionnement de l’arrêt de bus et de la zone de collecte de déchets à l’entrée du quartier évite l’entrée de véhicules lourds sur le site et le surcoût inutile de structure de chaussée. Avec plus de sécurité et moins de bruit, le cadre de vie se trouve amélioré.
Les cheminements piétons et certains parkings constitués en mélange terre-pierres augmente la perméabilité tout en réduisant l’entretien limité à un fauchage car se développant peu en végétation.
La gestion des eaux pluviales s’appuie sur un réseau de collecte à base de noues et de gargouilles qui participe ainsi au paysage du quartier.
La récupération d’eau de pluie dans des citernes alimente les jeux des enfants ainsi qu’une station de lavage de voitures.
Des composteurs publics permettent la valorisation des déchets.
Un inventaire faune flore a mis en avant la présence d’orchidées bourdons contribuant à la richesse naturelle de ce nouveau quartier. Le projet paysager s’appuie sur une palette de végétaux locaux qui se mangent comme le sureau, le noisetier et le néflier.
Des nichoirs d’oiseaux adaptés aux différentes espèces inventoriés constituent des signaux forts de la présence de biodiversité.
L’ensemble du projet a été conçu pour une gestion différenciée avec notamment une formation des agents à un désherbage sélectif. La prairie centrale ne nécessite qu’un fauchage.
Les espaces enherbés sont tondus avec mulching.
Les noues sont entretenues par les animaux de la ferme et ne nécessitent qu’une intervention tous les 2 ans.
Une démarche élargie au développement territorial durable : L'exemple de la communauté de communes de Doué la Fontaine (49)
Pour la commune de Doué la Fontaine la démarche d'Ecoquartier s'est inscrite dans le cadre d'un projet plus large d'éco-territoire.
Pour cette commune du Maine et Loire, l'Ecoquartier a eu une vocation de vitrine auprès des habitants afin de rendre lisible la démarche communautaire engagée dans l'élaboration du PLU intercommunal, la rédaction d'un agenda 21 et aujourd'hui la réalisation d'une AVAP.
Ainsi la démarche écoquartier a trouvé toute sa place car la commune s'était déjà engagée sur plusieurs axes :
Face au constat du développement de petits lotissements en périphérie au détriment du centre-bourg, laissant des bâtiments vides et sans entretien, le choix a été fait de privilégier l’urbanisation du bourg avec 75 % de l’offre en logement.
L’objectif est de profiter de l’existence des réseaux et voiries existantes, pour investir dents creuses et bâtiments délaissés. Par ailleurs, il s’agit aussi de restaurer l’équilibre des populations en faisant revenir les jeunes ménages près des services de proximité et favoriser ainsi les liens intergénérationnels.
Pour cela la démarche BIMBY ‘construire dans mon jardin’, dans le cadre de l’appel à projets "Villes Durables'' conduite avec le ANR, a permis la réalisation de 114 entretiens individuels avec un architecte.
Plusieurs actions ont été menées via différents dispositifs (OPAH, TEPCV, COTEC) et ont permis la mise en place d’opérations d’isolation, de chauffage, de covoiturage, d’éclairage public....visant à réduire la consommation d’énergie. La conduite de ces travaux a contribué ainsi au maintien du tissu économique local.
Le passage au zéro phyto en amont de la réglementation s’est appuyé sur une démarche axée sur l’expérimentation, la concertation et la transversalité des actions d’entretien.
Le projet de coulée verte dans le bourg s’est appuyé sur un travail collectif avec les habitants avec l’intervention de paysagistes concepteurs et d’un animateur communal. Il a donné lieu à l’amélioration de la signalétique, à l’introduction de ruches…souvent des actions nécessitant peu d’investissement de la part de la collectivité.